1Le persuasive design (design de persuasion) vise à concevoir des caractéristiques de produits ou de services pouvant influencer nos comportements. Pour pousser à l’action, le persuasive design utilise les leviers identifiés par les sciences comportementales et la psychologie sociale.
2La puissance de l’interaction digitale. Ce type de design a toujours joué un rôle, plus ou moins visible, par exemple dans les campagnes de publicité ou dans la conception de machines à sous. Rien de nouveau sous le soleil, donc ? Pas vraiment : avec l’avènement du digital, les leviers d’influence sont devenus omniprésents.
3Le Fogg Behavior Model. Professeur à Stanford en sciences comportementales, B. J. Fogg a décrit les mécanismes du persuasive design. Selon son modèle, le Fogg Behavior Model (FBM), trois facteurs essentiels – et leur convergence – influencent nos comportements :
- Nos motivations profondes et éternelles (éviter la souffrance et rechercher le plaisir) : pour favoriser un comportement, il faut susciter l’espoir ou la peur, profiter de notre volonté d’appartenance à un groupe et notre horreur du rejet (vous avez dit “réseaux sociaux” ?)…
- La simplicité : nous passerons d’autant plus à l’action qu’une tâche sera facile à accomplir (rapidité, coût réduit, minimum d’effort mental ou physique…)
- La présence d’un déclencheur (prompt) : l’étincelle ou le signal qui crée la motivation et le passage à l’action.
4Le persuasive designer emploie donc les techniques décrites dans des modèles tels que celui de B. J. Fogg pour inciter l’utilisateur à effectuer des actions prédéfinies – via son produit ou son service – sans qu’il ne s’en rende compte.
5Une question d’éthique (et tac !). Mais alors le persuasive design est-il éthiquement acceptable ? S’agit-il de manipulation ou d’influence positive ? Quelques repères ont été posés. Le persuasive design est considéré comme éthique lorsque :
- le résultat de l’influence améliore l’état de l’utilisateur et qu’il est capable d’en juger par lui-même (selon Richard Thaler, prix Nobel d’économie en 2017 et précurseur du nudge),
- le bénéfice de l’action est équitablement partagé entre le designer et l’utilisateur (selon Evil by Design),
- la réalisation d’une action que l’on souhaitait déjà faire, est facilitée.
6Les éthiciens du design. Pour lutter contre les effets potentiellement dangereux du persuasive design, plusieurs anciens des GAFAM se sont mobilisés. Quelques exemples :
- Tristan Harris a fondé le Center for Humane Technology après son départ de Google en 2016. Mission affichée : exposer les effets insidieux du persuasive design et améliorer nos capacités de décision.
- Frances Haugen, ancienne Product Manager de Facebook, est intervenue à ce sujet au Sénat américain en octobre 2021.
7Le persuasive design est l’une des formes les moins connues et pourtant la plus puissante du design. Son omniprésence nous montre à quel point le métier de designer a évolué. Fini le temps où le designer n’était perçu que comme un simple ”faiseur d’esthétique”.
La leçon à retenir
Ce ne sont plus nos objets mais nos comportements qui sont designés.
Pour aller plus loin
- Les exemples du Fogg Behavior Model en vidéo
- Le livre Hooked de Nir Eyal
- Facebook is a persuasive platform
- Is Designing for persuasion ethical?
- How to be a Design Ethicist at any company?
- Les principes du Design Ethique
Cet article vous a plu ? N’hésitez pas à le faire suivre à vos amis… Vous pouvez aussi vous abonner à notre Newsletter pour recevoir nos articles directement dans votre boîte mail chaque vendredi.